Jean-Pierre NICOLA (1929-2022), niçois d’origine, a redonné à l’astrologie ses fondements astronomiques, la naissance de l’astrologie étant historiquement liée à l’observation des astres, des saisons, de tous les phénomènes célestes, alors qu’elle passe de nos jours pour une pratique divinatoire exempte de toute référence aux lois des mouvements planétaires. Le retour de l’astrologie à ses bases naturelles (le ciel) est un retour à l’esprit de la tradition (unité du monde). Aujourd’hui, les astrologues qui placent le Sujet au centre de l’horoscope sont nécessairement en opposition avec l’astronomie moderne qui est héliocentrique (le centre est solaire). Autrefois, il n’y avait pas un sujet au centre du monde, il y avait un monde-sujet : les réalités extérieures sont reçues et comprises comme identiques aux réalités intérieures. La même science expliquait l’Homme et le monde.
les réalités extérieures sont reçues et comprises comme identiques aux réalités intérieures
Aussi : l’astronomie sans astrologie est une science sans âme et l’astrologie sans astronomie est une âme sans science. Aujourd’hui, les savants-physiciens les plus audacieux retournent à la conception du monde-sujet indissociable, non-opposable, en le reformulant autrement. J’ai démontré (Nombres et Formes du Cosmos, Éd. Traditionnelles et Cahiers Conditionalistes N° 2)1 que Soleil et Planètes forment un tout, un ensemble homogène et cohérent, à l’image d’une sphère. Pour être solidairement lié à une sphère, il n’est pas indispensable d’en occuper le centre2. Une orange ne se réduit pas à son centre et son écorce, l’homme ne se réduit pas à son nombril et à son horoscope.
C’est donc dans l’esprit réellement traditionnel des Ptolémée, Manilius, Cardan, Kepler, que j’étudie les phénomènes objectifs comme étant ceux d’un Être-Sujet déployé, et les phénomènes subjectifs comme étant ceux d’un monde incarné.
« Toutes les actions se déroulent dans le temps par l’entrelacement des forces de la nature (et de la surnature) mais l’Homme, perdu dans une illusion égoïste, pense qu’il en est lui-même l’acteur. Celui qui connaît la relation entre les forces de la nature et les actions, voit comment certaines forces naturelles agissent sur d’autres, et ne devient pas leur esclave » La Baghavad-Gita.
Évocation : à 15 ans, découverte de l’astrologie classique (désignée par judiciaire parce qu’elle appelle au jugement). Rencontre avec Volguine, astrologue ésotériste, puis avec l’astrologue H. Beer, auteur de Introduction à l’astrologie (Éd. Payot). Cet auteur m’a appris à contrôler la valeur des théories foisonnantes dans le milieu astrologique en les soumettant à des expériences simples : « Vérifiez toujours les théories à partir des thèmes qui devraient les illustrer au maximum » (Exemple : si Saturne ne gouverne que la tristesse, pourquoi est-il dominant chez Maurice Chevalier, chez Charlie Chaplin, J.-Christophe Averty, L. De Funès, Belmondo. Pourquoi ? Parce que la définition tristesse = Saturne est fausse. Il fallait en trouver une autre et, surtout, comprendre le thème autrement que par la doctrine de la signature typologique.
À 21 ans : rencontre avec le milieu astrologique parisien exclusivement axé sur l’astropsychologie (en dehors de quelques astrologues) et le symbolisme verbal que j’oppose au symbolisme concret des Anciens.
25–26 ans, je me détache ou distingue intellectuellement du groupe parisien par la conception d’un zodiaque réel, fondé non pas sur une suite d’images symboliques, ni sur les Saisons, mais sur la durée de présence ou d’absence d’un astre dans la partie supérieure de la sphère locale (techniquement : durées des arcs diurnes et nocturnes). Lorsque cette durée concerne le Soleil, nous avons le jour et la nuit avec ses variations dans le cycle annuel, et nous avons aussi les variations de chaud et froid saisonnières. Le Soleil n’est qu’un cas particulier (on ne peut donc pas fonder le zodiaque sur les saisons) : en réduisant sa lumière et son rayonnement, nous n’aurons plus la chaleur et le jour visible, mais nous aurons, au fil des mois et des Signes, les mêmes durées de présence au-dessus du ciel.
Exemple : en été, à Paris, sous le signe du Cancer, le Soleil, astronomiquement parlant, est présent 16 heures dans le ciel ; c’est la durée du jour pour cette latitude géographique. Oublions L’été et le Soleil, pour placer la planète Mars dans le signe du Cancer. Sans créer ni chaleur, ni lumière, Mars en ce Signe reste également près de 16 heures présent dans le ciel. C’est cette durée, sa variation au cours des Signes, ainsi que la durée d’absence, qui caractérise le Signe.3
Ce zodiaque introduit le temps4 (les durées), on l’appelle rythmique ou photopériodique. Il est terrestre parce qu’il est fonction de l’inclinaison de l’axe de rotation de la Terre et de la latitude géographique. C’est la planète qui introduit l’intensité (lumière ou gravité). Si le Soleil, du point de vue des durées de présence — pour une latitude donnée — est égal en importance à toutes les autres planètes, du point de vue de l’intensité, il vient évidemment en tête et l’on parle alors des effets saisonniers du Soleil sur hommes, plantes, bêtes… effets biologiques bien connus. Mais si la chaleur est retenue comme le support et critère de l’influence astrale, il ne devrait y avoir que le Soleil dans un horoscope… il ne reste rien de la chaleur hypothétique de Mars, Jupiter, Saturne, Uranus… devant la sienne. C’est pourquoi il fallait abandonner les définitions des Signes et des Planètes en terme de Chaud, Froid, Sec ou Humide, ou alors considérer que ces termes sont des Principes symboliques… ce qui revient — voir plus haut — à sortir de la sphère de l’Unité, se couper du monde réel en lui opposant un monde métaphysique. Or ce n’est pas dans cet esprit que la Tradition traitait du Chaud, du Froid, du Sec et de L’Humide. Pour les Anciens, ces Éléments expliquaient à la fois le réel externe (le monde) et le réel interne (le sujet).
Les effets astrologiques concernent donc des variations subtiles et qui dit variations dit temps, rythmes, cycles. Les variations d’ordre subtil réclament des récepteurs complexes (système nerveux humain, le cerveau). Le zodiaque rythmique a donc été transposé en zodiaque réflexologique (La Condition Solaire, 1964 aux Éditions Traditionnelles ; Pour une astrologie moderne, 1977 au Seuil). Le réflexe n’est rien d’autre qu’une réponse (inconsciente) à un signal. Il s’agit ici d’un signal subtil : un modèle d’organisation du temps, soit une structure rythmique (abstraction faite de la ligne mélodique, toute musique a une structure rythmique : la valse a une structure rythmique différente de celle du tango, du quadrille, du swing, de la marche, etc.). Nous écrivons des mélodies humaines, nous avons des pensées, des sentiments, qui épousent les rythmes hérités du ciel comme autant de modèles. Le rythme vient du ciel, la mélodie de l’homme. Il n’y a pas dépendance mais interdépendance : on ne peut pas écrire n’importe quelle mélodie sur n’importe quel rythme. Certains rythmes appellent une mélodie, certaines mélodies appellent un rythme. C’est le problème de la bonne résonance entre le ciel et l’Homme, le bagage céleste (les rythmes dominants à la naissance) d’une part, le bagage terrestre d’autre part (les possibilités sociales, héréditaires, historiques, tous conditionnements autres que ceux du ciel concernant le style d’écriture de la mélodie). Le bagage terrestre est loin de donner à chacun les moyens d’écrire une bonne mélodie, accordée à leurs rythmes. C’est pourquoi, pour vivre son ciel (écrire sur ses rythmes, trouver sa résonance avec le ciel) il faut généralement une bonne hérédité, une culture, une appartenance à une classe sociale permettant cette culture (ce point de vue a été confirmé par les statistiques : les Jupitériens fournissent professionnellement des acteurs, des sportifs, des députés, des héros de guerre… parce qu’il s’agit de la même fonction jupitérienne d’extraversion, accentuation du paraître et de l’effort conquérant, vécue différemment selon les couches sociales).
Ce point de vue reste traditionnel : Ptolémée, Cardan, Kepler ont souligné l’importance des autres conditions. Kepler a interprété son thème en tenant compte des facteurs familiaux, historiques, politiques qui contrariaient ou complétaient les tendances de son ciel de naissance. L’horoscope réduit à un Sujet étranger aux autres conditionnements de la naissance est une conception toute récente de l’astrologie coupée du réel astronomique et s’érigeant en absolu pour compenser cette coupure.
Les êtres de conscience aiguë peuvent retrouver en eux les modèles rythmiques qui façonnent leurs pensées et leurs œuvres. C’est le cas de Jaurès par exemple, natif de la Vierge, Signe où jour et nuit commencent à s’égaliser en durées. Or, l’un de ses biographes (Levy-Brühl) observe que chez lui : « L’antithèse de la lumière et de l’ombre revient presque avec la même fréquence et la même signification que chez Victor Hugo ». Lequel est ne aussi sous une dominante Vierge-Poissons (autre signe d’égalisation des durées jour-nuit). Nous écrivons, nous pensons sur nos rythmes modèles avec nos modèles terrestres. Le Capricorne dont le modèle rythmique est la présence du jour réduite à minima et l’absence portée à maxima, est le Signe qui passe, précisément, pour le plus distant, celui dont la pensée (selon la mélodie) est la plus abstraite ou la plus absente.
Ainsi, et conformément à la tradition, le zodiaque réflexologique permet de lire à la fois dans l’homme et le monde, le subjectif et l’objectif. II n’y a plus de rupture entre le symbole et le réel : le symbole est réel… c’est le réel dans l’Homme, ce n’est plus une image.
Je ne prends pas les origines du symbole dans la mythologie, je prends la mythologie à ses origines qui sont celles du monde sensible exprimé par les êtres les mieux intégrés aux réalités fondamentales : les poètes authentiques. Et non pas les intellocks du symbole5. Les symboles ne sont pas dans le livre des songes ni dans les livres de Freud. Ils sont vivants en chacun comme un langage réflexologique. Tout inventaire des significations des symboles est un cimetière.
Loin de rejeter le symbolisme je lui rends sa dynamique, sa liberté et sa vérité. Je rejette ses fossoyeurs.
Exemple de la vie et la mort d’un symbole : la chouette est, en tant que symbole défunt, symbole d’occultisme parce qu’elle voit clair dans la nuit. Aujourd’hui, elle est symbole d’écologie : réconciliation avec la nuit… symbole dynamique, symbole vivant, symbole d’une nouvelle lucidité, d’un désir de synthèse. Quel rapport avec l’occulte ? À mon avis, aucun. Le sens des symboles se régénère constamment.
Les réflexes sont des maillons intermédiaires entre le monde des signaux concrets et le monde des symboles humains. Ils réagissent à des signaux subtils (temporels et autres) et leurs réactions provoquent des états d’âme que nous exprimons par des images. Les plus doués en adéquation avec le monde trouvent les images auxquelles ils ont réagi par la finesse de leurs fibres (ou la complexité). Ensuite : nos pensées et sentiments se construisent sur nos images-réflexes. Ainsi : le Sujet pensant devient le monde qui le pense.
Les réflexes sont des maillons intermédiaires entre le monde des signaux concrets et le monde des symboles humains.
La mélodie induit le rythme, le rythme induit la mélodie. La pensée — la mienne en tout cas — se puise dans le monde réel. Si Dieu a fait le monde à son image, pourquoi refuser l’image ? Ces principes ne conviennent évidemment pas au symbolisme de salon et encore moins aux fervents de l’astropsychologie qui, en considérant les planètes comme des entités privées de racines concrètes, feignent d’ignorer qu’ils soumettent leur métaphysique aux lois de la gravitation universelle. Ces contradictions sont masquées par de grandes dissertations sur l’analogisme… II ne s’agit même pas d’irrationnel mais d’absurdité, d’incohérence, de confusion mentale, et je comprends parfaitement l’attitude anti-astrologique de savants quelque peu chatouilleux sur des points de logique élémentaire. (Sauf que, si l’astrologie en place est devenue un fatras, ils en sont grandement responsables).
L’astrologie conditionaliste ne rejette pas le symbole, elle l’objective en signaux concrets et subtils (les signaux sont le langage du monde). Elle ne rejette pas davantage les applications psychologiques. Simplement, celles-ci ne peuvent pas se faire dans une optique réductionniste qui, en excluant les paramètres socio-culturels, biologiques et autres, conçoit la personnalité comme un type mythologique ou comme un assemblage de types qui frisent la caricature. L’expérience (consultation) montre que la doctrine des types ne donne rigoureusement et pratiquement rien, ce que les partisans des typologies signalent discrètement en avouant — en marge — qu’il n’y a pas de type pur ! Et pour cause… les planètes ne sont pas des types mais des signaux temporels (cycles) éveilleurs de fonctions…
Le temps est langage : dans le système solaire les cycles sont ordonnés. Cet ordonnancement est aussi un langage, en lui-même et pour l’Homme. Lorsqu’on analyse les contenus sémantiques des attributions astrologiques concernant les planètes, pour celles ayant des cycles (révolutions sidérales) de durée relativement brève, on constate des significations axées sur le court terme et soulignant les impératifs personnels, les fonctions et besoins d’adaptation à l’immédiat (Lune : vie végétative ; Vénus : amours, appétences ; Mercure : investigations, relations ; Soleil : affirmation personnelle…) tandis que les planètes lentes (longues durées de révolution autour du Soleil, telles celles d’Uranus 84 ans, de Neptune 165 ans, de Pluton 249 ans) se rapportent à des valeurs collectives, aux lois et courants propres à de larges communautés culturelles ou à l’espèce plutôt que l’individu.
Comme pour le zodiaque, j’ai montré, pour les planètes, la logique et l’homogénéité de leurs significations en prenant le temps (durées de révolutions autour du Soleil) pour critère. Le système R.E.T. (Représentation-Existence-Transcendance) qui résume toutes les significations astrologiques des planètes, se transpose en lui-même en trois repères temporels : Représentation, court terme ; Existence, moyen terme ; Transcendance, long terme.
Là encore : accord avec la symbolique concrète inspiratrice des archétypes mythologiques. En mythologie grecque, Thémis est mère des Heures et des Parques, fille du Ciel et de la Terre. Selon la légende, c’est elle qui a établi la divination et qui appliqua tout son art à l’astrologie. La relation avec le temps est manifeste, de même que la double ascendance : Ciel et Terre des déterminismes permettant la divination par l’astrologie (les cycles régissent et ordonnent aussi bien le mouvement des astres que celui des atomes). Le temps est un dénominateur commun au Ciel et à la Terre, à l’astronomie comme à la biologie. Il est facile de s’en assurer par l’application des durées planétaires (cycles) aux étapes de la maturation de l’Homme6).
La Lune dont le cycle est de 28 jours en moyenne, gouverne les valeurs fondamentales de l’enfance, la dépendance, l’osmose, la mère-nourriture, la globalité, l’homogénéité… Mars dont le cycle moyen est d’environ 2 ans, voit son cycle (donc sa fréquence astronomique moyenne) coïncider avec les années ou l’enfant doit avoir intégrer les conduites d’affrontement avec le monde des objets… Jupiter (12 ans) voit son premier cycle correspondre à l’âge de l’organisation du langage, de l’apprentissage des conduites au sein d’un groupe, etc.
En poursuivant selon l’ordre de succession des cycles, Saturne vient ensuite pour la période de 12 à 29,5 ans (durée de son cycle) en coïncidence avec la crise pubertaire et la résolution de cette crise par une autre dimension de l’être intime et de l’être social… si la crise est résolue.
Cette correspondance de Saturne avec l’âge de l’adolescence a fait bondir les adeptes du symbolisme formel et codifié qui ne veulent voir en Saturne qu’un vieillard… Saturne se lève pourtant (le lever d’un astre est le premier critère de détermination de sa puissance) dans le ciel de Poulbot dont l’œuvre ne foisonne guère en vieillards. Hergé, le père de Tintin et Milou est également né sous une heure forte de Saturne (culmination). On peut citer encore Johnny Hallyday, Françoise Hardy, Gainsbourg, parmi nos vedettes de la chanson. Loin d’être vieux, ils chantent souvent les tourmentes, les révoltes, les inadaptations de la jeunesse, d’une âme toujours en crise… Et comment expliquer Saturne vieillard et triste lorsqu’il domine le ciel de Belmondo, de Fellini, de Cohn-Bendit, de Catherine II, de Trigano, de Bedos, de Bobet ? C’est que, la jeunesse n’est pas un type mais une famille de valeurs. Et Saturne lui-même n’est pas un portrait tout encadré mais une fonction qui se réalise différemment selon le contexte et ses relations avec les autres fonctions planétaires.
Face à ces évidences expérimentales (je n’ai pas oublié la leçon de l’astrologue H. Beer), ceux qui tiennent au type saturnien sénile et schizoïde, se rabattent sur les autres éléments du thème : tantôt l’Ascendant, tantôt une ou deux autres planètes. C’est-à-dire qu’ils n’appliquent pas leur théorie de la signature planétaire, sauf dans quelques cas très représentatifs qui sont toujours les mêmes et qui reviennent en ritournelle dans leurs exemples. Afin d’éviter l’excès d’élasticité, l’astrologie conditionaliste s’est donnée des définitions strictes mais ses contradicteurs trouvent, les uns, qu’elles sont encore trop larges, les autres trop rigides. Ce qui tend au moins à prouver que, de toute façon, elles dérangent.
Pour des interprétations synthétiques et moins entachées des projections inconscientes de l’interprète, comme pour ses recherches, l’astrologie conditionaliste élabore des méthodes de travail sans rapport avec les statistiques : celles-ci ne font que tester des éléments fragmentaires dissociés du contexte social, familial, historique… En ce sens, elles s’appliquent exclusivement a la théorie des types zodiacaux et planétaires. Les travaux, études, essais de notre école sont exposés dans les Cahiers Conditionalistes, bulletins internes du COMAC.
Astrologie et sciences parallèles
La psychologie en général, l’astropsychologie en particulier privilégient la référence au Sujet (le Moi, la psyché, les états d’âme, l’être dans son vécu, etc.). La Science, notamment les sciences physico-chimiques et astronomiques ont privilégié la référence à l’Objet qui se présente à leurs yeux (de Sujets) comme un monde mesurable indépendant du vécu subjectif et de toute psychologie : finalement un monde où il n’y a pas de référentiel Sujet. Univers rêvé par excellence pour un scientiste.
On commence à découvrir ou redécouvrir l’importance du référentiel qui associe Sujet et Objet, qui les met en Relation pour montrer par exemple que certaines choses n’arrivent qu’à certains êtres, ou encore qu’il n’y a pas de mesures physiques totalement objectives indépendantes de la nature subjective de l’observateur. Il y a bien d’autres conséquences, bien d’autres hypothèses aussi concernant les effets de la Relation Sujet-Objet7.
Après le Sujet, l’Objet, la Relation, l’astrologie conditionaliste suppose un quatrième référentiel : l’lntégration, qui concernerait une dimension hyper-complexe et rien moins que cette globalité précédemment démontrée pour le zodiaque (tous les Signes se tiennent comme les phases d’un cycle et non comme une juxtaposition de légendes cartonnées) et pour les planètes (les significations planétaires forment un ensemble cohérent d’informations en interférences constantes).
Ce référentiel dont il reste beaucoup, presque tout a découvrir, a longtemps été le privilège du mystique, du mage, du poète, de l’irrationnel… L’astrologie conditionaliste (ainsi que d’autres disciplines d’avant-garde) s’en approche par des voies logiques et analytiques. Elle estime, par exemple, que les phénomènes dit paranormaux doivent relever de l’Intégration (synthèse complexe d’un ensemble de relations). Pour elle, l’étude du temps (cycles, rythmes, continuités, discontinuités) qui s’est révélée constructive pour une théorie cohérente et ouverte de l’astrologie, doit déboucher sur la compréhension des phénomènes mettant en cause des relations entre ensembles complexes. Par exemple, un écosystème implique l’intégration de divers rythmes et cycles, tant externes qu’internes, vivants que non-vivants (8).
Prédictions
Elles réussissent lorsque l’interprète a intuitivement intégré toutes les données (célestes et terrestres) d’un être. Grâce à cette intégration (généralement inconsciente), l’interprète peut alors concevoir correctement la réaction d’un Sujet à une échéance temporelle donnée. Sinon, sans cette Intégration, il faut honnêtement s’en tenir à parler des échéances, des problèmes qu’elles posent et des réponses possibles dans telles ou telles conditions.
La prédiction sans comprendre n’est utile qu’au référentiel Sujet de l’interprète. C’est lui qui en tire profit et non son consultant.
Les prédictions spectaculaires à l’intention d’un grand public ratent le plus souvent parce l’astrologue qui se livre à ce genre de prédictions n’a pas du tout le souci d’intégrer toutes les données des personnalités sur lesquelles il prophétise. Il vise un effet publicitaire assurant sa carrière sur le compte (et sur le dos) de ceux auxquels il prédit toutes sortes de calamités, si ce n’est la mort de surcroît. Leur bonne fortune dépend du malheur des autres. Pourquoi se priveraient-ils de souhaiter les catastrophes annoncées ? II faut relire les mémoires des grands prévisionnistes attendant l’événement… c’est-à-dire la guerre. Ce n’est vraiment pas de l’intégration. Et pourtant ce genre d’astrologisant parvient à passer pour spiritualiste !
J’enseigne autour de moi : « On ne peut prédire qu’après avoir compris. Comprenez d’abord… cherchez donc à réunir les éléments qui aident à comprendre ». La prédiction sans comprendre n’est utile qu’au référentiel Sujet de l’interprète. C’est lui qui en tire profit et non son consultant.
Il faut malheureusement reconnaître que la société de consommation et les modèles astrologiques en place permettent rarement une pratique idéale de la prédiction. En mythologie, Thémis faisait sans doute des prédictions exactes. Mais Thémis est une déesse connaissant à la fois les Heures et rouages du Ciel et de la Terre. N’étant pas Thémis, il est plus sage — prudent diront les sceptiques — de parler des échéances du ciel en proposant de leur répondre le mieux possible avec les moyens du moment (9).
Notes :
- Ce texte remonte à 1981. On peut donc ajouter les Éléments de Cosmogonie Astrologique, en attendant la suite…
- La construction du centre entraîne donc la prise de conscience du Tout.
- Ces définitions, déjà complexes pour ceux qui ne voient que des symboles dans les Signes, sont insuffisantes au regard des réalités astrométriques. Elles ne peuvent être précisées que dans des publications techniques qui reviennent cher à l’Association et ont peu (?) de lecteurs.
- Autre définition incomplète qui a donne prise à des systèmes fantasmatiques. Le temps astrologique n’est ni psychologique, ni continu, ni uniforme… Pour souligner cette différence d’avec le temps des horloges artificielles, le bon usage voulait que le temps astrologique soit qualifié. L’expression de temps structuré me parait plus exacte. Elle respecte les formules zodiacales (Quarte d’extinction-intégration pour la structure) et l’ordonnance du système solaire (cycles privilégiés par une ordonnance numérique). Dans La Condition Solaire, j’ai associé le Temps à la 3e Quarte (Automne pour le Soleil d’hémisphère Nord). Par la suite, la structure des phases (égalité, proportion, généralité) a permis de répertorier différentes acceptions du temps : alternance avec la Balance, échéance (dose) avec le Scorpion, évolution avec le Sagittaire. Réduire le Temps à l’une ou l’autre de ces acceptions est déjà une erreur de fond… en faire une ordonnance structurale comme le fait René Colucci avec : pré-contact, contact, plein-contact, post-contact, serait grave pour nous s’il s’agissait de définitions conditionalistes. Heureusement, il s’agit de l’un des multiples avatars du quaternaire inspiré par le référentiel Sujet branché au pararelationnel psycho-sexuel psychanalytique. On n’a pas de mal à imaginer le plein contact des pénétrés-continuateurs de Freud, Reich et consort. C’est passionnant, attractif, et sans doute utile à la drague des obsédés ou des manipulateurs, mais ce n’est pas du conditionalisme qui relève de l’esprit du squelette et non pas des ficelles (ou articulations gestaltiennes) des va-et-vient de la libido. Sur ce plan, je préfère la littérature du Kama-Soutra à un quelconque phraseur du « cycle de la Gestalt ». Il va de soi que, n’étant pas d’un caractère léger, je reviendrai en termes explicites sur cette récente tentative de subordination du conditionalisme aux élucubrations des psy-Sujet. Il va y avoir du plein contact dans la mise au point.
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Pour ce qui concerne les origines concrètes du symbolisme zodiacal, l’astrologue-astronome Ptolémée a lui-même établi des corrélations naturelles entre les Signes et les phénomènes astronomiques : « Il existe en effet des Signes tropiques, d’une part le premier intervalle de 30° depuis le solstice d’été, soit la ligne du Cancer, de l’autre, le premier signe depuis le solstice d’hiver, soit le Capricorne. Ces Signes ont reçu leur nom de ce qui se passe en eux. En effet, le Soleil, lorsqu’il est entré dans ces Signes, recule en arrière, tournant son cours en une latitude contraire, causant l’été dans le Cancer, et dans le Capricorne l’hiver. Il y a encore deux Signes équinoxiaux, le Bélier printanier et l’automnale Balance, qui eux aussi ont pris leur nom de ce qui se passe en eux, car quand le Soleil est au début de ces Signes, les espaces du jour et de la nuit sont égaux par toute la Terre ». (La Tetrabible, 155 après J.C).
Pour ce qui concerne les légendes mythologiques attribuées aux Signes, la plupart, sinon toutes, illustrent les phases de variations des durées de lumière (arc diurne) et d’obscurité (arc nocturne). Exemple : Verseau : Ganymède est ravi aux cieux par un aigle (dévolu à Jupiter), en Verseau le Soleil accentue sa remontée vers l’équateur céleste ; il décolle. Poissons : émergence des Eaux du Dieu Oannès, symbolique d’un disque d’or partagé en deux, ou du dauphin bondissant hors de l’eau. En ce Signe, le disque solaire va vers l’intersection avec l’équateur céleste. Bélier : Le Bélier Chrysomallos est un Bélier volant, le Soleil prend de la hauteur au-dessus de l’équateur céleste. Gémeaux : Castor et Pollux, l’un des deux doit mourir : en ce Signe, fin de la croissance du jour. Cancer : l’écrevisse recule comme la durée du jour ; Hercule ne peut pas vaincre la renaissance d’une tête de l’Hydre : la nuit redevient croissante. Vierge : enlèvement de Proserpine par Pluton : le jour « rentre » sous terre ; mouvement de descente du Soleil, il passera en automne sous le plan de l’équateur céleste. Balance : Psyché, perte de la lumière. Scorpion : le chasseur est dans les bois, l’ange déchu en enfer, le Soleil est bas. Sagittaire : mort terrestre d’Hercule, naissance à la vie céleste : fin de la croissance du jour.
Comment se fait-il que les exégètes du symbole ne parlent pas de ces correspondances ? Seraient-ils incapables de ressentir quoi que ce soit des mouvements de la nature ?
- Nouvelles réserves à faire, en 94, par rapport a 81. Il m’a fallu une bonne dizaine d’années pour comprendre que la chronologie n’était pas, non plus, une simple continuité. Les astrologues para-conditionalistes qui l’utilisent uniquement sous cet aspect, ont raison lorsqu’ils veulent amorcer un intérêt, séduire un public… Ils ont tort, lorsqu’ils en restent là. L’écoulement du temps structuré, précisément parce qu’il est structuré, nous apprend la structure, qui n’est plus une dimension temporelle.
- Le référentiel Relation entraîne la réciproque des affirmations précédentes : certains êtres n’arrivent qu’à certaines choses et il n’y a pas de subjectivité totalement indépendante de la nature objective des êtres. Mais la Relation est également le réseau des liens (scénario) indépendant ou différent du Sujet et de l’Objet.